Tout sur les filles (2)

Texte de référence : ici.

Aujourd'hui plus que jamais, Internet a une place primordiale dans nos vies et la création artistique littéraire ne saurait ignorer ce nouveau mode de communication très en vogue.  De nombreux textes à valeurs morales circulent dans nos boîtes sans pour autant que l'on y prête attention. J'ai décidé de m'attarder au moins une fois sur ce type d'écrit tout à fait intéressant et miroitant un nouvel état d'esprit : la mailing prédiction. A la manière des sacrifices qui étaient faits aux dieux dans l'Antiquité pour bénéficier de leur bonté, la mailing prédiction nous demande de sacrifier nos contacts pour que notre bonheur se fasse. Le texte que je vais analyser est un très bon exemple de la mailing prédiction. Arrivé dans ma boîte après une longue pérégrination de milliers d'adresses e-mails et envoyé par une de mes amies qui va devoir me rendre compte des effets escomptés du renvoi de ce mail, il n'a pas été renvoyé, la mailing prédiction ayant été brisée dans la branche internautique qui me concerne. J'ai préféré en faire une fine analyse pour en comprendre le sens profond et les enjeux.

Cette analyse se fera de manière linéaire, c'est-à-dire au fil du texte. Peut-être en dégagerons nous une étonnante révélation dans la progression de l'écrit?

Extrait (1) : Les filles pensent avec les yeux.

Quand une fille est calme...des millions de choses occupent ses pensées

Quand une fille ne se dispute pas...elle pense profondément.

Quand une fille te regarde avec les yeux pleins de questions...elle se

Demande Combien de temps tu resteras près d'elle

Est-ce que Gabin avait vu que Morgan pensait lorsqu'il la regarda dans les yeux et lui en loua la beauté ? Bonne question. Léonard de Vinci précisait que les yeux étaient le miroir de l'âme. Ce premier quatrain s'attarde sur la pensée des filles. Ainsi on nous révèle dès la première ligne : " Quand une fille est calme...des millions de choses occupent ses pensées". Adoucit par la présence d'une allitération et assonance en voyelles et consonnes nasales, le texte s'ancre déjà dans le domaine de la féminité.

Mais peut-on vraiment se fier à cette première assertion? Le calme apparent d'une fille n'est pas obligatoirement la preuve d'un processus de pensée actif : elle a peut-être tout simplement enfin réussi à s'épiler correctement, ce qui lui ôte tout stress quant à la possibilité que monsieur voit ses jambes, elle a peut être un bug interne, l'empêchant d'avoir un quelconque influx nerveux, elle est peut être tout simplement malade car en général une bonne gastro ça calme.

On remarquera que "pensées" est en fin de vers, mis en valeur mais très éloigné de "une fille".  A vous de conclure.

Le second vers commence comme le premier par  un complément circonstanciel de temps  dans lequel la suite de termes "Quand une fille" se répète. Magnifique anaphore n'est-ce pas? Cette répétition se fera tout au long du texte, procédé qui évidemment, montre que le thème du texte c'est une fille en général et lui donne toute son importance. Mais arrêtons nous sur l'expression "Quand une fille ne se dispute pas" et tentons d'en comprendre le substantifique sens. "Se disputer" implique toujours d'être au moins 2 en règle générale. Il est donc difficile, a priori, de trouver du sens à l'utilisation de ce verbe dans le cas présent. Et pourtant on pourrait penser que l'auteur ici a voulu faire passer plusieurs messages :

- la fille faisant partie d'un couple, il est inutile de citer l'autre partie de ce couple
- le crêpage de chignon est inné chez les filles et donc il est inutile de faire apparaître une autre fille
-elle fait un régime et se dispute intérieurement elle-même pour ne pas manger tout le placard à gâteaux
-elle a des tendances masochistes et aime se disputer elle-même pour assouvir ses pulsions.
-elle gueule souvent et s'apparente à une dispute à elle toute seule cette dernière conception étant tout à fait tordue.

Remarquons que l'absence de l'activité "se disputer" provoque une activité "penser profondément". Ce qui est très réducteur et laissant penser que la fille ne pense pas profondément en permanence mais uniquement pendant les périodes où elle ne se dispute pas.

Le troisième vers, " Quand une fille te regarde avec les yeux pleins de questions...elle se" est encore plus énigmatique. Que signifie l'expression "les yeux plein de question?"? Signifie-ce (quoi signifie-ce ça se dit non? ) qu'une fille sait exprimer l'interrogation rien qu'avec son regard?  Signifie-ce (MAIS OUI CA SE DIT!) que le blanc de l'œil féminin se remplie lisiblement de tas de points d'interrogation épars ?

Mais nous remarquerons l'élégant enjambement qui unit syntaxiquement ce troisième vers au quatrième vers. En effet, le troisième vers s'arrête sur "elle se" pour te terminer sur le quatrième vers " Demande Combien de temps tu resteras près d'elle". Cet effet d'attente fort judicieux est la traduction poétique du mode question/réponse qui se ressent dans l'attente produite par la structure coupée, il montre aussi l'ignorance de la communauté masculine à l'égard de la gente féminine et qui ne comprennent pas les petits points d'interrogation parsemés dans le regard de leur douce et tendre.

Mais au-delà de toute ces considérations il est clair que ce premier quatrain s'axe essentiellement sur l'expressivité du regard féminin et soulève déjà la question de l'implicite chez la femme c'est-à-dire la capacité à ne faire passer des messages que par sous-entendus. L'auteur prête aux filles des facultés intellectuelles dont apparemment personne ne se doute puisqu'il se permet de fournir une sorte de mode d'emploi très pratique.

La suite bientôt !