Ici même, il y a un an ! (1)
La
trépidante journée d'une responsable d'un rayon liquide…
4H30. Le réveil
sonne. Je me suis couchée tôt, mais je n'ai pas vraîment envie de poser le pied
à terre. En plus, il recommence à faire froid le matin. Je me traîne tant bien
que mal jusqu'à la salle de bain pour prendre ma douche. 4h50. Je sors de la douche. Je
reviens vers ma chambre, j'enfile ma tenue de travail. Je démêle mes cheveux
frénétiquement sinon après je les ai toujours tout bizarres avec des nœuds gros
comme des gonades de mammouths. Je me fais deux tresses qui me valent au boulot
plusieurs surnoms :Fifi brin d'acier, Pocahontas, Heidi ou encore Laura Ingalls
(ça tombe bien la maison de mes parents est dans une prairie …).
En fait,
j'avoue que j'aimerais plutôt qu'on me surnomme "La
Viking"
Après
avoir confectionné mes
deux nattes sublimes, je mets mes chaussures de montagne. Il est environ 5h00. Oui madame, oui monsieur, des
chaussures de montagne ! La dernière fois que j'ai fait une rando c'était avec
des baskets pourries et je vais au boulot avec des chaussures de montagne. Mais
si ça peut vous rassurer je les ai achetées après la fameuse randonnée (ndlr : à Grenoble en Aout 2007).
Mais pourquoi des
chaussures de montagne? C'est vrai que les jours de livraison, la réserve du
magazin ressemble à l'Himalaya : telles sommets alignés, les palettes immenses
et empaquetées dans du plastique blanc rappellent, par un rapport choucroute
très recherché, la fameuse chaîne de l'Himalaya, son altitude,
ses sommets enneigés…Mais si je mets des chaussures de montagne, ce n'est pas
pour m'harmoniser avec ce décor, je suis de toutes manière déjà en harmonie
avec Ecomarché, grâce à mon sublime T-shirt Mousquetaire. En fait, j'ai mal
souvent mal aux chevilles, et les chaussures de montagne qui sont montantes et
réglables me soulagent.
Une
fois mes chaussures chaussées, après un bref arrêt sur image, -c'est-à-dire rester assise
sur mon lit, le regard dans le vide, les bras tout flasque et une subite envie
de me recoucher-, je me dirige vers la cuisine. 5h15 voire 5h20 voire 5h25 selon la longueur de l'arrêt sur image
ou s'il y a eu plusieurs arrêts sur image au cours de ma préparation matinale.
Je chope mes petites hormones thyroïdiennes du matin, je bois un verre de lait,
j'mange un truc ou je le fous dans mon sac parce que je suis à la bourre et je
le mange en voiture, ceci dépendant encore de la longueur de l'arrêt sur image.
Et surtout, je gère le truc insupportable qui m'sert de clébard et qui, quand
bien même me paraît être le plus beau des chiens du monde, me perturbe dans le
bon déroulement de ma préparation.
Il veut des gratouilles, faire pipi ou caca , mais ne veut
pas aller dehors tout seul parce qu'il fait noir, il veut des biscuits, il veut
son papa et sa maman qui roupillent encore…Mais il comprend souvent à mon
regard que c'est pas l'moment d'm'enquiquiner et il retourne s'coucher en
pleurnichant. Arrive l'heure de partir : 5h30-5h35. Où est mon téléphone portable? Dans mon SAC (et
pas ailleurs ! :p). Où sont mes clés de voiture? Dans ma main (et pas ailleurs
j'ai dit ! ). J'ai tout , c'est bon je peux me barrer. J'allume la lumière de
dehors et en même temps je fais s'abaisser le volet roulant de la porte
d'entrée que j'avais préalablement fait remonter et vite je sors en fermant la
porte avant que le volet me tape sur la tête. [ATTENTION, ce que vous venez de
lire est à reproduire uniquement si vous êtes sûre de pouvoir être suffisamment
agile de bon matin pour réaliser une telle prouesse qui demande de la rapidité
et de l'observation]. Qu'advient-il de la lumière? Désolée pour les économies
d'énergie, mais y'a pas d'interrupteur dehors, et quand il fait noir, c'est
bien la lumière nan? Du coup ça reste allumé une bonne heure le temps que ma
mère sorte du lit et vienne l'éteindre. Je me dirige vers ma voiture, je
démarre, je fais demi tour et avec les phares j'éclaire le portail, je sors de
la voiture, j'ouvre le portail, je remonte dans la voiture, je sors la voiture
du terrain, je sors de la voiture, je ferme le portail et je pars. 5h40. Je jette un coup d'œil sur le
ciel étoilée parfois, qui est vraiment très beau en campagne, surtout quand il
est dégagé, d'autant plus que je trouve qu'à cette heure de la nuit, les
étoiles sont encore plus scintillantes. Je prends la route et là le spectacle
commence. Grenouilles, rongeurs, ratons laveurs, blaireaux, chouettes, biches,
sangliers et chevreuils sont de sorties. Les trois derniers je les crains comme
la peste. On leur a pas appris à vérifier qu'une voiture arrive avant de
traverser, alors je roule pépère en grignotant parfois le petit déj que j'ai
pas eu le temps de prendre.
J'arrive à Ecomarché 5h50-5h55. Bon, y'a un truc qui m'énerve, c'est d'avoir à
faire la bise à tous les collègues le matin. J'ai toujours espoir que mon BOOOOOOOOOOOONJOUUUUUUR enjoué du matin
suffise, mais non, faut faire le tour de bise. Moi j'aime pas faire la bise. Je
pose mon sac au casier et direction la fameuse réserve Himalayesque.
Oh! Des palettes ! Des palettes Géantes (ouais enfin, ce
matin, c'était plutôt le massif armoricain : la chef avait oublié de valider
toutes les commandes, du coup j'avais juste une tite palette minable) ! Oh !
Hop, en avant transpalette ! En avannnt ! Et là, commence la séance de sport.
OUI, MONSIEUR , OUI, MADAME , DU SPORT ! Déjà faut tirer les fameuses palettes
couvertes de pack et de cartons d'bouteilles en tous genre jusqu'au rayon,
c'est-à-dire sur environ 30 m.
Quand les
jambes sont pas encore réveillées ou le cerveau c'est assez rigolo : on est pas
rapide et en plus on cogne d'un coin d'palette tout ce qui se trouve sur la
route. Une fois au rayon, faut désemballer la palette. Soit on a un cutter et
c'est tout simple, soit on a pas de cutter (ce qui était mon cas, jusqu'à
aujourd'hui) et on arrache tout avec les doigts et la force des bras ce qui fait
une première suée. Le déchargement des palettes, c'est le plus fatigant : il
faut enlever les packs et les cartons, les amener jusqu'à l'endroit où il faut
les ranger, les poser dans les étagères, ou ouvrir les cartons et ranger les
bouteilles, grimper à l'échelle pour stocker les restes tout en haut du rayon.
Et comme c'est lourd, ça fait transpirer. Ca fait maigrir \o/ (ouais j'ai perdu 4 kilos ! )
et en plus ça fait des gros biscotos (appelez moi Hulk !). En général j'ai
deux ou trois palettes et je les vide pour 8h-8h15. Je prends 5 minutes pour recharger mon rayon en
packs d'eau et puis c'est l'heure du ménage. Tout le monde chope un balai et on
balai le sol du supermarché. Ensuite c'est l'heure (8h30) du facing. Ah mais
c'est quoi le facing? Dans facing y'a "face", comme dans
"façade". En fait il s'agit de faire les avancées de tout les
produits afin que tout le premier rang soit plein et uniforme. En gros on avant
tout jusqu'au bord, et en plus ça fait joli et les clients ils peuvent se
servir facilement.
8h45
: ARRRRGH faut que j'aille compter ma caisse. J'vais chercher mon caisson,
j'compte mes sous. Une autre caissière arrive et compte aussi. Je la laisse et
j'vais prendre ma pause avec les autres. Pis ensuite je m'occupe de mes
"casquettes" parce que souvent j'ai pas hyper le temps de les faire
les jours de livraisons. Mais qu'est ce que les
"casquettes"? Non ce n'est pas un chapeau à demi bec qu'on se
fout sur la tête. C'est en fait le dernier étage des rayons qui sert à stocker
les surplus, qui sert à entreposer le stock et qui évite d'envahir la
petite réserve. Ce qu'il y a de bien dans une casquette bien tenue, c'est
qu'elle permet à n'importe qui du magasin de pouvoir recharger le rayon quand
la personne qui s'en occupe n'est pas là pour le faire, ça lui évite de courir
à la réserve chercher dans les cartons , ça fait gagner du temps et de
l'argent, le client est servi instantanément en cas de rupture en rayon et ça
c'est la classe.
De temps en temps ma collègue m'appelle pour la caisse, et je
reprends mes
habitudes de caissière. Et puis dès que je peux je pars faire mes commandes.
N'imaginez pas qu'on téléphone, qu'on maile, ou je ne sais quoi d'autre. En
fait, on a ce qu'on appelle un M.S.I. Je ne sais pas ce que ça veut dire, mais c'est une sorte
de mini ordinateur en forme de gros téléphone qui scanne des codes. C'est avec
ça qu'on passe les commandes puis la chef les valide et les envoie. Les
commandes la première fois toute seule c'est flippant, surtout quand votre chef
vous dit "Démerde toi, je te fais confiance". Surtout quand on
connaît pas encore ce qui part le plus ou le moins. Je suis fait avoir sur
certains trucs, genre, Le coca light…c'est incroyable comme ça se vend super
bien, et mieux que le coca normal. En 1 journée mon rayon est vide en coca
light. L'oasis orange, ça aussi, à croire qu'ils remplissent prennent même leur
bain avec. Par contre, le jus d'goyave…ça a pas grand succès. Maintenant
ça va mieux, je commence à connaître mes produits, ceux qui marchent bien, et à
gérer plus ou moins bien mes stocks. Et puis ensuite j'vais ranger ma réserve,
ou j'finis en caisse, selon le flux d'clients…et quand arrive 12h, je ferme ma caisse et je me
casse en disant "Houra!
Vivement la sieste !".
Tout ça pour dire,
que, c'est crevant, mais j'aime bien. Surtout quand mon rayon est tout beau,
tout bien rangé et ça l'fait !
Ah ah ! Mes débuts de gestionnaire de rayon ! Un an après, je gueule toujours "Houra, vivement la sieste" quand je sors du boulot !